Le marketing d'influence s'impose comme un levier stratégique en B2B, à condition d’adopter la bonne approche : répétition plutôt que volume ponctuel, authenticité plutôt que nombre d'abonnés et vision long terme.
Au début, Lou Sernaglia, CMO chez Abby, était sceptique. Aujourd'hui, elle pilote une stratégie qui génère des résultats concrets. Du test initial à l'internalisation, en passant par la sélection des créateurs et le suivi de l'impact, découvrez les étapes concrètes pour lancer et structurer votre stratégie de marketing d’influence.
Le marketing d’influence s'impose comme un levier stratégique en B2B
LinkedIn s'impose comme le terrain de jeu idéal pour le marketing d’influence B2B. La plateforme concentre une audience professionnelle qualifiée, avec des décideurs actifs et engagés. L'influence y est encore peu développée, ce qui crée une fenêtre d'opportunité pour les early adopters.
Chez Abby, plateforme de gestion pour micro-entrepreneurs, les résultats sont sans appel. Après 6 mois de test avec l'agence Linker (budget : 250-500 €/mois), Lou Sernaglia observe une corrélation évidente :
« Les mois où on ne faisait pas d'influence, on avait moins d'encaissements que les mois où on en faisait. »
Au-delà des chiffres, d'autres signaux confirment l'impact : reconnaissance spontanée de la marque, tags organiques sur LinkedIn, et même des blagues sur Abby qui circulent dans les communautés de freelances. Ces indicateurs qualitatifs prouvent que la présence mentale se construit durablement.
Phase 1 : tester avec une agence
Lou était la première sceptique. Il y a 2 ans, elle considérait l'influence comme « un truc de télé-réalité pour vendre des blanchiments dentaires ». Le déclic est venu d'une rencontre networking entre le CEO d'Abby et Théo Lion, fondateur de Coudac, qui était en train de monter l’agence Linker.
Le test initial :
Budget : 250-500 €/mois
Plateforme : LinkedIn exclusivement
Durée : 6 moisValidation : corrélation directe entre mois avec influence et encaissements
Le choix de LinkedIn reposait sur trois raisons.
Ciblage précis :
Les freelances, cœur de cible d'Abby, sont naturellement présents sur LinkedIn. C'est là qu'ils se trouvent, qu'ils échangent et qu'ils cherchent des solutions pour gérer leur activité. Pas besoin d'aller les chercher ailleurs.
2. Marché immature :
L'influence B2B sur LinkedIn était encore peu développée il y a 2 ans. Contrairement à Instagram ou TikTok saturés de sponsorisations, LinkedIn offrait un terrain vierge avec peu de concurrence. Une vraie opportunité pour les early adopters.
3. Ratio coût/efficacité :
Avec un budget limité (250-500 €/mois), LinkedIn permettait de toucher directement le cœur de cible sans dispersion. Chaque euro investi touchait des prospects qualifiés, là où d'autres plateformes auraient eu besoin de budgets bien plus élevés pour le même résultat.
« Le ratio argent investi VS cœur de cible qu'on touche tout de suite a fait qu'on a accepté ce test. »
Pendant six mois, l’agence Linker a géré le sourcing, les échanges et le pilotage des campagnes, le temps pour Lou de comprendre les mécaniques de l’influence B2B.
✅ À retenir : testez via une agence B2B, observez la corrélation entre influence et encaissements, puis internalisez une fois le modèle validé.
Phase 2 : internaliser pour reprendre le contrôle de votre stratégie de marketing d’influence
Après 6 mois de test concluants, Lou Sernaglia décide d’internaliser la gestion du marketing d’influence. Un choix stratégique dicté par quatre objectifs : garder la main sur l’image de marque, créer une relation directe avec les créateurs, gagner en efficacité et garantir la qualité des contenus.
« Je me suis rendu compte que c'était un sujet à part entière et que je n'avais pas envie de le laisser dans les mains d'une agence. »
Une fois les mécaniques comprises, Lou réalise qu’elle peut tout piloter seule : sourcing, briefs, contrats, reporting.
Pas besoin d’équipe dédiée : chez Abby, chaque campagne active 20 à 30 créateurs sélectionnés dans un pipeline d’une centaine de profils qualifiés.
Internaliser lui permet aussi de renforcer le lien humain avec les créateurs :
« Je trouve ça hyper important de pouvoir échanger avec les gens qui vont prendre la parole sur ton sujet et sur ce que tu as construit. C'est aussi une partie sympa du boulot de rencontrer des nouvelles personnes. »
✅ À retenir : internalisez dès que possible pour garder le contrôle sur le message, fluidifier l’exécution et créer une vraie relation de confiance avec vos créateurs.
7 principes opérationnels pour réussir en influence marketing B2B
Principe 1 : répétition et cycles courts
La règle de répétition
Lou a testé deux approches radicalement différentes. L'une a échoué, l'autre a transformé la stratégie d'Abby.
Elle a d'abord tenté de travailler avec 5 gros influenceurs, chacun publiant une seule fois sur une période de 3 mois. Résultat : « ça ne sert à rien du tout. » Une seule publication, même avec un gros reach, ne suffit pas à créer de la présence mentale. Le post disparaît, la marque aussi.
Elle a ensuite activé 10 à 15 petits créateurs, chacun publiant 2 à 3 fois sur les mêmes 3 mois. Résultat : « là on est impactant et on couvre plusieurs bulles d'audience. »
Cette approche crée une présence répétée dans le feed des prospects. La marque revient régulièrement, portée par des voix différentes, ce qui installe durablement son nom dans l’esprit de la cible.
« Bosser avec 5 gros influenceurs sur 3 mois qui vont publier une fois, ça ne sert à rien du tout. [...] Par contre, activer 10 à 15 petits influenceurs qui vont publier 2 à 3 fois sur ces 3 mois-là, là on est impactant. »
Cette logique rappelle les stratégies Outbound les plus efficaces, où la répétition et la segmentation fine sont clés.
Pourquoi ça fonctionne
« L'algorithme nous enferme vraiment dans notre feed. On a toujours les mêmes personnes, nos pairs. » En travaillant avec un seul type de créateur, on touche toujours la même audience. En diversifiant, on multiplie les bulles d’audience.
Chaque créateur a sa propre communauté. En activant 15 créateurs différents, vous touchez 15 communautés distinctes. Quand chacun publie plusieurs fois, la marque apparaît régulièrement dans des dizaines de feeds : c’est le cercle vertueux de visibilité.
Structurer par cycles courts
Lou a structuré ses campagnes selon un rythme précis :
Durée des campagnes : 1 à 2 mois maximum.
Pause entre chaque vague : 2 à 3 mois.
Volume d’activation : 20 à 30 créateurs.
Ce modèle cyclique maintient une présence régulière sans saturer l’audience ni les équipes.
Diversifier les expertises
La CMO a ciblé des créateurs issus d’univers variés, même si la cible finale (les freelances) restait unique.
Top 5 expertises :
Freelances digitaux (marketing, design, dev)
Développeurs web
Artisans
Services à la personne
Coachs sportifs
Résultat : « On nous voyait quel que soit le sujet et quel que soit le feed. » Chaque audience entend le même message, porté par une voix qui lui ressemble.
L’évolution vers l’affiliation
Lou a constaté que ses meilleurs influenceurs étaient aussi ses meilleurs clients. Elle a donc lancé un modèle d’affiliation annuelle pour les top performers :
création de contenu régulier ;
rémunération à la performance (abonnements générés) ;
sélection sur fiabilité et qualité.
✅ À retenir : privilégiez 10 à 15 nano/micro-créateurs (1K–20K abonnés) publiant 2 à 3 fois sur 3 mois. Structurez en cycles courts, diversifiez les expertises et activez 20 à 30 créateurs par vague.
Principe 2 : prioriser les bulles d’audience par CA
Après avoir trouvé le bon rythme et la bonne fréquence de publication, Lou s’est concentrée sur un autre levier décisif : identifier les audiences les plus rentables. Car publier souvent ne suffit pas si l’on ne s’adresse pas aux bons segments. C’est tout l’enjeu de la priorisation par chiffre d’affaires.
Les créateurs n’ont pas été choisis au hasard, mais selon le chiffre d’affaires généré. Pour cela, Lou Sernaglia a suivi ces 3 étapes :
1. Lister les métiers/segments clients
Elle a extrait les métiers déclarés par les utilisateurs d’Abby : 354 métiers différents. Trop large pour tout couvrir, il faut prioriser.
2. Identifier le top 5 contributeurs de CA
Elle a croisé deux critères :
volume d’abonnements générés ;
valeur moyenne par abonnement.
Ces 5 segments deviennent la priorité, car leur ROI est validé. Une fois couverts, elle élargit progressivement.
3. Créer un mapping « sujets × créateurs »
Elle a ensuite construit un tableau visuel sur Miro :
colonnes = thématiques (artisanat, sport, marketing, finance, etc.) ;
lignes = créateurs activés.
Cette méthode a permis de :
Visualiser la couverture des sujets.
Éviter le sur-investissement sur une même thématique.
Ajuster selon le CA généré par segment.
Grâce à ce mapping, elle a découvert qu’elle sur-investissait en marketing, alors que les coachs sportifs rapportaient davantage, et a réalloué ses efforts.
✅ À retenir : partez de vos données clients pour identifier le top 5 segments par CA et créez un mapping visuel sur Miro pour équilibrer vos efforts.
Principe 3 : Sélectionner à l’engagement, pas à l’audience
Pour cela, il est important de distinguer 2 types de critères :
1. Critères qualitatifs (prioritaires)
Statut : freelance, auto-entrepreneur ou side business.
Sujet : cohérent avec vos verticales prioritaires.
Authenticité : créateur habitué à ce type de contenu.
2. Critères quantitatifs (secondaires)
Engagement > nombre d’abonnés.
Indicateurs clés : likes, commentaires, réponses.
En marketing d’influence B2B, l’objectif n’est pas la masse, mais la qualité de l’audience.
« Le nombre d’abonnés m’importe peu. [...] Un créateur avec 1 000 abonnés ultra engagés génère plus de valeur qu’un compte à 40 000 passifs. »
✅ À retenir : priorisez statut, sujet et authenticité avant tout. Puis regardez le taux d’engagement réel.
Principe 4 : Sourcer manuellement hors de sa bulle
Une fois ces critères de sélection clairement établis, encore faut-il trouver les bons profils. Et c’est souvent là que les outils automatisés atteignent leurs limites. Lou a donc misé sur une approche manuelle, plus exigeante mais bien plus efficace pour identifier des créateurs authentiques.
La CMO a testé plusieurs méthodes, qu’elle a finalement laissées tomber :
❌ Favikon : créateurs trop « pros », peu authentiques.
❌ Books d’agences : profils formatés.
Aucun outil ne permettait d’identifier des « premiers sponsors », ces créateurs n’ayant jamais fait de collaboration.
Elle a dû trouver une autre méthode, beaucoup plus efficace :
Créer un compte LinkedIn vierge pour sortir de sa bulle algorithmique.
Faire de la veille manuelle active pour repérer les créateurs authentiques.
Cibler des profils sans sponsorisation passée.
« Ces créateurs apportent plus d’authenticité et coûtent moins cher. » Ils sont plus vrais, moins chers et leurs communautés plus réactives.
✅ À retenir : créez un compte neutre, ciblez les premiers sponsors et acceptez que le sourcing manuel prenne du temps.
Principe 5 : Brief et contrat structurants
Lou a partagé avec chaque créateur un brief complet sur Notion comprenant :
description d’Abby, ses objectifs et sa vision ;
assets : logo, visuels, vidéos ;
calendrier de rendez-vous ;
tableau bonnes/mauvaises pratiques.
Une règle était primordiale : chaque créateur doit tester le produit avant d’en parler.
Elle n’a pas dicté le format des contenus : « ce n’est pas moi qui ai monté leur communauté, c’est eux. » Le fond prime donc sur la forme, le message et les valeurs sont cadrés, mais le format reste libre pour les créateurs.
Mais au départ, elle travaillait sans contrat : erreurs, oublis, contenus non publiés. Pour pallier à cette situation, elle a fait rédiger un contrat type par un avocat, avec deux clauses clés :
exclusivité sectorielle d’environ 3 mois pour les créateurs ;
droits de réutilisation pour les vidéos et ads d’Abby.
Concernant les commentaires négatifs, le protocole est également strict, les créateurs ne répondent jamais seuls. 3 options se présentent : la suppression du commentaire, une réponse d’Abby via Lou, ou via le CEO.
Enfin, une page Notion par créateur est créée, avec les métriques suivantes :
reach ;
vues ;
engagement (likes, commentaires, taux de clics).
✅ À retenir : partagez un brief complet, contractualisez dès le départ, encadrez les commentaires et standardisez le reporting.
Principe 6 : Mesurer par signaux et corrélations
Le tracking parfait n’existe pas en marketing d’influence. Lou Sernaglia le reconnaît : « c’est un vaste sujet auquel je n’ai pas encore trouvé toutes les réponses. »
Pourtant, elle a mis en place plusieurs leviers simples pour mesurer l’impact de ses campagnes sans tomber dans l’illusion du suivi exhaustif.
Elle commence par combiner plusieurs sources de données : des liens UTM uniques attribués à chaque publication, des codes promo personnalisés intégrés dans Stripe, l’analyse des réactions et commentaires sous les posts, l’évolution des courbes d’abonnés sur les réseaux, et la Brand Search (via Google Ads ou Search Console) après chaque campagne.
Ces signaux ne permettent pas une attribution directe, mais ils construisent un faisceau d’indices cohérent.
Le signal le plus fiable, selon elle, reste la corrélation entre influence et encaissements :
« Les mois où on ne faisait pas d’influence, on faisait moins d’encaissements. »
Autrement dit, plutôt que de chercher à tout tracer, Lou observe les tendances macro : quand les campagnes tournent, la marque encaisse davantage. Ce lien indirect reste le meilleur indicateur de performance.
Cette approche s’adapte aussi aux cycles de vente longs, fréquents en B2B. Dans ce cas, Lou recommande trois actions concrètes :
Ajouter la question « Comment nous avez-vous connus ? » dans les formulaires d’inscription ou de démo.
Suivre la Brand Search avant, pendant et après les campagnes pour observer les pics de notoriété.
Et surtout, accepter l’imperfection du tracking : de nombreux prospects voient un post, mémorisent la marque, puis la recherchent plusieurs semaines plus tard.
« On le sait, même nous quand on partage un lien, on ne clique pas dessus. On retape le nom de la marque dans Google. »
L’objectif n’est donc pas de mesurer chaque clic, mais de capter la dynamique d’ensemble : la montée en visibilité, la reconnaissance spontanée et les signaux positifs sur les encaissements.
✅ À retenir : fiez-vous aux corrélations macro et aux signaux faibles. Le tracking n’est jamais parfait, mais les tendances sont mesurables et suffisamment robustes pour piloter vos décisions.
Principe 7 : Budgéter et négocier
Une fois la performance mesurée et les bons signaux identifiés, reste à gérer le nerf de la guerre : le budget.
L’un des freins majeurs à la mise en place d’une stratégie d’influence B2B est la perception du coût. Pourtant, les tarifs observés par Lou montrent qu’il est possible de démarrer avec des budgets maîtrisés, à condition de bien choisir ses canaux et ses profils.
La plateforme la plus accessible pour tester le modèle, les tarifs varient entre 150 et 500 € pour un créateur nano (1 000 à 5 000 abonnés), 500 à 1 000 € pour un micro-créateur (5 000 à 20 000 abonnés) et jusqu’à 4 000 € pour des profils établis au-delà de 20 000 abonnés, souvent sur deux publications.
LinkedIn reste le point d’entrée idéal : audience qualifiée, ciblage précis et retour sur investissement rapide à observer.
Youtube
Les budgets sont plus élevés sur Youtube, autour de 1 500 à 2 000 € dès 5 000 à 7 000 abonnés, mais le contenu y est pérenne. Une vidéo vit plusieurs mois, voire plusieurs années, offrant une visibilité continue.
Ces tarifs plus importants s’expliquent par la production plus lourde (tournage, montage, intégration sponsorisée).
Longtemps considéré comme le canal le plus cher, Lou constate une baisse générale des prix.
Il y a encore deux ans, certains créateurs à 10–15 000 abonnés demandaient jusqu’à 5 000 €. Aujourd’hui, des comptes à 200 000 abonnés facturent environ 3 000 €. La tendance se régule, portée par une maturité du marché et une concurrence accrue.
En mesurant les bons indicateurs et en optimisant le budget, Lou a bâti une stratégie d’influence complète : structurée, mesurable et durable. Une méthode duplicable pour toute marque B2B souhaitant internaliser efficacement son marketing d’influence.
✅ À retenir : commencez petit sur LinkedIn (250–500 €/mois) pour tester et mesurer l’impact sur les encaissements. Une fois le modèle validé, élargissez progressivement à YouTube pour la durabilité et à Instagram pour la notoriété, tout en gardant des cycles courts et mesurables.
Le marketing d’influence B2B, ce n’est pas une question de budget ou de viralité, mais une histoire de rythme, de cohérence et de relations humaines.
Abby en est la preuve : quand on structure sa stratégie, qu’on choisit bien ses créateurs et qu’on mesure ce qui compte vraiment, l’influence devient un levier concret de croissance puissant.


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