Coûts d’acquisition en hausse, budgets en baisse : comment continuer à générer de la croissance sans sacrifier la qualité ? Pour beaucoup, la réponse passe par une transformation du modèle, et la Demand Gen s’impose peu à peu comme la meilleure façon de concilier performance et pertinence.
Finie l’obsession du MQL à court terme : place à une démarche plus pédagogique, plus engageante, et surtout plus durable. Grâce aux retours d’expérience de Domitille de Saint-Exupéry, CMO chez Lemlist, et Thibaut Davoult, VP Growth Ops chez Livestorm, découvrez les leviers concrets pour transformer votre marketing en moteur de croissance à long terme.
Demand Gen vs Lead Gen : comprendre les 2 dynamiques
Avant de construire une stratégie efficace, il est fondamental de comprendre la différence de temporalité entre Lead Generation et Demand Generation.
La Lead Gen s’adresse à des prospects déjà conscients de leur besoin. C’est un marketing orienté solution, souvent tactique, centré sur les opportunités court terme. Domitille de Saint‑Exupéry la résume comme un « marketing de la solution » : on pioche dans un vivier de prospects déjà conscients de leur douleur et prêts à comparer des outils.
À l’inverse, la Demand Gen relève d’un « marketing du problème ». On éduque ceux qui n’ont pas encore formulé le besoin, mais qui représentent la majorité du marché :
« Pour moi, la différence, c’est que la lead gen c’est aller chercher des prospects déjà mûrs, conscients du problème et prêts à acheter, alors que la demand gen, c’est aller plus en amont éduquer son marché. »
Thibaut Davoult ajoute : « faire 100 % Lead Gen, c’est n’adresser qu’environ 5 % de son marché ». D’où la nécessité de penser long terme, construire de la notoriété et instaurer la confiance, même si le ROI n’apparaît pas en 30 jours.
Mais convaincre la direction reste difficile, il faut prouver l’utilité et la nécessité de la Demand Gen malgré des résultats moins instantanés que l’acquisition pure :
« Il faut réussir à prouver la valeur de faire de la demand gen et d’arriver à faire penser les dirigeants sur du plus long terme. »
Pourquoi le contexte rend la Demand Gen indispensable
La montée en puissance de la Demand Gen n’est pas un effet de mode. Elle est souvent déclenchée par une pression externe sur le modèle d’acquisition.
Chez Livestorm, Thibaut Davoult explique qu’après l’explosion du paid media pendant le Covid, le coût d’acquisition a drastiquement augmenté. Pour maintenir un niveau de performance, ils ont dû mettre en place une échelle de KPIs intermédiaires : exposition → interaction → contact commercial.
Pendant sa précédente expérience chez PlayPlay, Domitille a vécu une autre réalité : l’internationalisation et une réduction de budget post-série C. Résultat : une mutualisation des efforts marketing indispensable.
« Quand les budgets sont contraints, chaque contenu doit pouvoir vivre sur plusieurs marchés, dans plusieurs formats. Sinon, on jette de l’argent par les fenêtres. »
Ce sont ces contraintes qui ont poussé les 2 entreprises à développer une stratégie Demand Gen solide et scalable.
Les 4 piliers pour construire une stratégie Demand Gen performante
1. Les Webinars & événements réplicables
Plutôt que de multiplier les actions déconnectées, il est essentiel de bâtir une stratégie cohérente et articulée autour de 4 leviers majeurs.
Les événements thématiques sont parfaits pour segmenter l’audience en fonction de son niveau de maturité. Chez PlayPlay, Domitille a mis en place un Content Summit, conçu pour être dupliqué par marché :
« Un même contenu peut nourrir à la fois l’awareness, la lead gen, et le sales enablement si on pense sa réutilisation dès le départ. »
2. Employee advocacy sur LinkedIn : miser sur les voix internes
Domitille publie tous les jours sur LinkedIn, générant jusqu’à 600 000 vues par semaine. L’objectif : ancrer la crédibilité de la marque dans une voix humaine et authentique.
3. Les contenus longs : base de la stratégie
Les contenus longs (études, vidéos, articles) alimentent à la fois le SEO, les relances commerciales et les campagnes de nurturing. Exemple chez PlayPlay : une étude vidéo sur le Covid réutilisée dans les campagnes outbound.
4. Influence marketing sur LinkedIn
Chez Lemlist, Domitille a mis en place un programme d’influence basé sur la valeur pédagogique, en collaboration avec des micro-influenceurs (entre 4 000 et 15 000 abonnés). Trois formats de contenus sont utilisés :
ToFu : posts inspirationnels (résilience, mindset)
MoFu : checklists, prompts IA
BoFu : vidéos de cold call en conditions réelles
« Les micro-influenceurs préfèrent apporter de la valeur que faire de la promo. Ça marche mieux, et c’est plus durable. »
L’approche Allbound : quand la Demand Gen booste aussi les Sales
Le véritable avantage de la Demand Gen se joue dans sa capacité à renforcer l’efficacité commerciale. En exposant vos audiences cibles à des contenus de qualité, vous les « réchauffez » avant toute approche Outbound :
« Je pense que parler d’Allbound marche bien en comité exécutif, il faut arrêter de dire qu’il y a un funnel Outbound et un funnel Inbound, la plupart des boîtes font les 2, et tes actions demand gen doivent améliorer la productivité de ton Outbound. »
Domitille partage un exemple très concret de cet effet : chez Lemlist, les équipes récupèrent systématiquement les personnes ayant liké ou commenté les posts d’influenceurs partenaires sur LinkedIn, puis les intègrent directement dans leurs séquences Outbound, sans modifier le contenu des messages. Cela permet de doubler le taux de réponse par rapport à un ciblage froid basé uniquement sur les ICP classiques :
« Ces prospects sont déjà un peu « chauffés » : ils ont vu le nom de Lemlist dans le post d’une personne respectée de leur secteur, ce qui crée un premier signal d’intérêt. C’est beaucoup plus efficace que de partir de zéro. »
Mesurer la Demand Gen : adoptez une lecture par compte, pas par lead
L’un des grands défis de la Demand Gen, c’est qu’elle ne génère pas toujours des résultats immédiatement visibles dans le pipeline. Pour autant, cela ne veut pas dire qu’elle ne produit aucun effet mesurable. Thibaut Davoult insiste sur la nécessité de changer complètement de boussole en matière de pilotage.
Au lieu de se limiter à une vision centrée sur les opportunités ou les MQL dans le CRM, il recommande de mettre en place une cartographie d’engagement au niveau du compte. Cela permet de suivre précisément l’évolution d’un prospect stratégique, bien avant qu’il ne prenne contact avec vos équipes : « piloter par compte, c’est passer d’une vision à l’aveugle à une gestion ultra précise des comptes stratégiques. »
Les outils recommandés par Thibaut pour structurer ce suivi :
HubSpot : utilisé pour créer des objets personnalisés de type Account Engagement, qui permettent d’enregistrer chaque interaction pertinente avec un compte — que ce soit une publicité vue, un email cliqué ou une participation à un webinar.
Salesforce : reste la source de vérité principale pour les équipes commerciales, notamment pour tout ce qui concerne les opportunités et les actions Sales.
OMI : cette app de business intelligence permet de centraliser et visualiser toutes les données issues de HubSpot et Salesforce. Résultat : des dashboards clairs, lisibles, et surtout actionnables, qui permettent aux équipes de suivre la progression des comptes cibles dans le funnel.
Les KPIs intermédiaires à suivre de près :
Exposition : un membre du compte a vu ou interagi (like, commentaire) avec un contenu.
Interaction marketing : inscription à un événement, téléchargement de ressource, participation à un questionnaire.
Interaction commerciale : réponse à un email outbound, demande de call, prise de rendez-vous.
Trafic direct ou organique : un excellent proxy pour mesurer la notoriété de marque sur un marché donné (ex. : PlayPlay a observé un bond du trafic direct en Allemagne six mois après ses premières campagnes Demand Gen locales).
Cette approche plus granulaire permet à l’équipe marketing de démontrer des signaux clairs de progression, même en amont du pipeline. Et c’est précisément ce type de reporting qui permet de rassurer une direction, souvent impatiente de voir des résultats tangibles.
La méthode « Cheval de Troie » : la stratégie Demand Gen des petites équipes
La Demand Gen ne nécessite pas forcément une équipe marketing de dix personnes ni un budget à six chiffres. Domitille de Saint-Exupéry en est convaincue : même avec peu de ressources, il est possible de bâtir une stratégie efficace et visible, à condition de penser malin, ciblé et réutilisable.
C’est dans cet esprit qu’elle recommande ce qu’elle appelle la stratégie du « Cheval de Troie » : une méthode simple qui permet de décupler l’impact d’un seul actif en le déployant sur l’ensemble du funnel : « Les assets produits pour la Demand Gen servent aussi à l’activation et à la conversion. C’est un effet vertueux. »
Étape 1 : choisir un sujet qui attire
Tout commence par le choix d’un sujet fort, qui capte naturellement l’attention de votre audience cible. Il peut s’agir :
d’une réglementation récente (ex. : RGPD, IA Act) ;
d’une tendance sectorielle émergente ;
ou d’un nouveau positionnement produit différenciant.
L’objectif est de créer un effet « aimant » : attirer les bons profils grâce à un sujet pertinent et engageant.
Étape 2 : créer un contenu « noyau »
Ce sujet « aimant » devient ensuite la base d’un contenu central, ce que Domitille appelle l’actif « noyau ». Il peut prendre la forme :
d’un webinar avec des invités experts ;
d’une étude chiffrée ou benchmark exclusif ;
d’un rapport de tendances soutenu par des insights internes ou clients.
Ce contenu est conçu pour être à la fois dense, utile et réutilisable.
Étape 3 : décliner en cascade
Une fois le contenu principal créé, l’enjeu est de le décliner sur tous les formats et canaux, afin de nourrir l’ensemble du funnel marketing :
Carrousels LinkedIn pour générer de l’awareness.
Emails de nurturing à destination des leads tièdes.
Decks commerciaux pour alimenter les argumentaires des SDR.
Mini-campagnes Ads (notamment en retargeting) pour toucher les comptes déjà exposés.
Chaque déclinaison reprend les insights du contenu noyau, avec un angle adapté à sa cible et à son niveau de maturité.
Étape 4 : mobiliser les expertises internes
Enfin, pour augmenter la portée sans alourdir la charge de travail, Domitille recommande d’impliquer les figures internes de l’entreprise. Le CEO, les fondateurs ou même les leads produit peuvent être mis à contribution pour porter la voix de la marque :
en participant à des podcasts sectoriels ;
en intervenant dans des webinars tiers ;
ou en publiant des contenus à haute valeur sur leur propre profil LinkedIn.
Lead Gen et Demand Gen ne s’opposent pas, elles se complètent. Mais si vous continuez à piloter votre marketing uniquement à la prise de rendez-vous, vous passerez à côté de 95 % de votre marché.
Si vous voulez générer de la croissance sans cramer votre budget paid, c’est maintenant qu’il faut structurer votre approche Demand Gen.


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